Lara et l’ogresse

Pour les enfants

Ce conte est une allégorie pour la paix. Il raconte le lien affectif qui unit une grand-mère et sa petite-fille. La parole s’entremet entre le réel assombri par la guerre incessante qui ravage une région non géographiquement déterminée et le désir de vivre entre humains sans violence. Si la grand-mère raconte un conte à l’enfant pour lui insuffler l’espoir d’une fin de la guerre – ogresse-dévoreuse , elle lui inculque aussi le travail de la terre comme rapport essentiel des hommes avec la vie.

Quelle relation à la vie pour des enfants qui ne connaissent que la guerre ? Pour des enfants chez qui la peur a remplacé la projection de vivre ? Les contes dénouent la peur, ils sont maîtres en la matière ; les contes donnent l’appétit de vivre chez tous les enfants du monde, c’est là leur force évocatoire. Mais pour aboutir il leur faudrait moduler l’action d’une génération sur la suivante et réciproquement ; il leur faudrait donc nouer un lien de continuation entre les générations.
Lara et l’ogresse, bellement illustré en gris et blanc, n’est pas un conte expiatoire. C’est un conte de la conscience en responsabilité. L’envie de vivre et d’échapper à la dépression traumatique transmise par la grand-mère à sa petite fille se mue en sa réciproque quand la petite-fille, usant, de même, et du conte et du rapport à la terre, réamorce le goût de vivre de sa grand-mère. Or cette action peut trouver sa réalisation parce qu’il y a passage de la violence à la non-violence, au niveau de la société comme au niveau immanent de l’individu. Cette interprétation, qui se construit au fil de l’album, s’appuie sur la thématique de l’entrecroisement des générations. Ici, aucun stéréotype social contemporain n’a prise, ni la régression à l’ordre gérontocratique ni le jeunisme illusoire. La non-violence, comme moteur de l’avenir humain, se nourrit, dans l’album, du développement des consciences sur la base de la leçon de choses dont les guerres imprègnent le monde contemporain. L’album illustrerait alors une solidarité qui vaut responsabilisation intensifiée.

Philippe Geneste

Françoise Joire & Jihad Darwiche,
Lara et l’ogresse, bilingue français-arabe,
L’Harmattan, 2021, 52 p.

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