Vive la Sociale !

Trois éditeurs et une collection pour nous faire découvrir l’histoire du mouvement libertaire en Amérique latine. Pour cette fois, il s’agira de l’Argentine, de l’Équateur, du Mexique, du Paraguay et du Pérou. Pluralité d’expressions, telle est la caractéristique de ces textes dont il ne sera pas possible de donner le détail.

Argentine : « Ni Dieu, ni patron, ni mari », c’est le mot d’ordre du premier journal anarchiste féministe de ce pays, La Voz de la Mujer, qui paraît en janvier 1896. Les femmes y revendiquent un droit à la parole dans un milieu militant qui montre une certaine incompréhension à leur égard. Pour Hélène Finet, l’auteure de l’article, la question sociale et indissociable de la question féminine. Ces femmes estiment que seule une révolution sociale violente pourra « balayer le clergé, le gouvernement, l’autorité, le capitalisme, les codes, les lois, la magistrature, et toute cette phalange de fainéants qui ne produisent rien et qui profitent de tout sur notre dos » ; elles pensent également que l’écriture devient libération pour lutter contre l’oubli et l’éphémère.
Plus loin, Guillaume de Gracia évoque la Semaine tragique de janvier 1919 à Buenos Aires et rappelle que la FORA (Fédération ouvrière régionale argentine) fut, un moment, la principale force ouvrière du pays ayant adopté comme but final le communisme anarchiste.

Équateur : À la fin des années 1890, par l’entremise des marins, l’anarchisme fait son entrée en Équateur par le port de Guayaquil opposé à la capitale Quito située au centre du pays. David Doillon et Pierre-Henri Zaidman décrivent un anarchisme relativement violent qui débouche en 1922 sur la création d’une Fédération régionale des travailleurs de l’Équateur, organisation de lutte de classes qui décrète la grève générale devant l’obstination patronale. Après un incident lors d’une manifestation de masse, les forces de l’ordre interviennent en massacrant environ un millier de personnes. Une féroce répression des militants s’ensuivra.

Mexique : Pays de grands propriétaires, soutenus par l’État, qui ont dépossédé la population paysanne et indienne de ses terres collectives, le Mexique fut cependant un territoire qui attira beaucoup de socialistes étrangers. L’arrivée en 1861 de Plotino Rhodakanaty, un disciple de Fourier et de Proudhon, va modifier un paysage politique quand il introduit « un socialisme militant de tendance antiautoritaire ». David Doillon écrit que Rhodakanaty, opposé à une révolution armée est partisan de la non-violence. Ce dernier terme nous paraît anachronique, ce mot n’ayant fait son apparition que bien plus tard. Cependant, il est à noter que Rhodakanaty fut à l’origine de la première association socialiste et libertaire. Créateur d’écoles, un de ses élèves, Chàvez López, est à l’origine de la première révolte armée paysanne qui annonce celle, une quarantaine d’années plus tard, d’Emiliano Zapata.
Cependant, on peut lire dans La Internacional de 1878 : « Nous ne voulons pas d’une révolution armée qui transforme brutalement l’ordre des choses ; ce que nous proposons est un changement graduel et systématique qui remédie aux nombreux abus qui se commettent aujourd’hui. »
David Doillon décrit bien, par ailleurs, les différentes influences libertaires présentes dans le mouvement mexicain.

Paraguay : Comme un peu partout, l’organisation ouvrière commence dans ce pays par une société de secours mutuel qui devient société de résistance puis de lutte. Les idées anarchistes sont importées par les Argentins. Le premier texte anarchiste diffusé prône tous les moyens, y compris la dynamite et le poison, pour réaliser l’émancipation des travailleurs. En 1906 est fondée la Fédération ouvrière régionale paraguayenne.

Pérou : Joël Delhom met en valeur l’influence de González Prada qui « pense que toute lutte armée constitue une forme de préparation du peuple à la révolution finale ». Par surcroît, il anticipe sur un discours anti-impérialiste qui aura cours par la suite.

Joël Delhom, David Doillon, Hélène Finet, Guillaume De Gracia
Viva la Social !
Anarchistes & anarcho-syndicalistes en Amérique latine (1860-1930)
América libertaria éd., 2013, 250 p.

■ ■ ■

Ce contenu a été publié dans Amérique latine, Textes. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *